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Justice for Kurds Thomas S. Kaplan

Biden : A quoi peuvent désormais s’attendre les Kurdes trahis par Trump ?


« Nous n’avons d’autres amis que les montagnes… ». Ce proverbe implacable des Kurdes revient à chaque fois qu’ils se retrouvent laissés à eux-mêmes, priés de se débrouiller seuls, un tour de force auquel ils ont été trop souvent contraints depuis un siècle. 

Ce proverbe n’aura jamais eu autant d’écho que sous les quatre années d’administration Trump. 

Les Kurdes ont essuyé deux trahisons. 

La première en septembre 2017, dans la foulée du référendum sur l’indépendance du Kurdistan (supposément « irakien ») approuvé par 93 % des votants, mais que les forces irakiennes et les milices iraniennes réduisirent à néant à la bataille de Kirkouk et dans ses environs, se déchaînant contre les Kurdes à grand renfort de chars américains Abrams.

Une seconde trahison s’ensuivit qui commença à petit feu par l’annonce, le 19 décembre de ce même 2018, que deux mille soldats américains quitteraient sous peu le Rojava, la zone kurde autonome du nord de la Syrie, décisiontemporairement suspendue à la suite d’un torrent de protestations de tous bords. Mais le 6 octobre 2019 survint un événement, lui sans appel : le commencement du retrait des forces américaines, lequel précipita l’offensive d’Erdogan contre les Kurdes du nord syrien.

« Vous nous laissez tomber… Vous nous livrez au massacre…Vous nous avez vendus…  C’est totalement immoral » protesta, véhément, le général kurde Abdi Mazloum Kobani, chef des Forces Démocratiques Syriennes (FDS). Mais aucune aide ne vint en remplacement. Et les Kurdes qui avaient vaillamment combattu, et versé sans compter leur sang, pour défendre contre Daech notre civilisation commune furent tragiquement abandonnés.

L’intronisation, ce mercredi 20 janvier 2021, de Joe Biden et Kamala Harris à Washington offre l’opportunité de renverser ce véritable Munich américain, qui fut « un crime contre la décence et le sens communs ainsi qu’une faute aux dimensions épiques, non moins qu’un lamentable exercice d’auto-immolation » (Le Washington Post, 17 octobre 2019, Thomas S. Kaplan et Bernard-Henri Lévy). 

La nouvelle ligne, qu’incarnent le Secrétaire d’Etat Tony Blinken, le conseiller au Conseil National de Sécurité Jake Sullivan et le coordinateur pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord Brett McGurk (qui occupa le poste d’envoyé spécial auprès de la coalition internationale contre Daech, et démissionna en réaction à la décision de Trump de retirer ses troupes du Nord de la Syrie) devrait ouvrir une nouvelle ère dans le soutien aux Kurdes.

Mais reportons-nous au dialogue public qui eut lieu, en novembre 2019, dans la grande salle du prestigieux Centre Culturel juif de New York qu’on appelle familièrement « le 92Y », entre les déjà nommés :  le défenseur de l’environnement et des valeurs humanistes Thomas S. Kaplan et le directeur de La Règle du Jeu Bernard-Henri Lévy, co-fondateurs de Justice For Kurds.

Ils revinrent sur le « Plus jamais ça », fondateur de l’Occident post Deuxième Guerre Mondiale. 

Ils rappelèrent qu’il est absolument pertinent de parler de génocide à propos du martyre kurde. 

Ils fouillèrent dans l’histoire du Moyen-Orient, et dans l’histoire des relations entre Israël et l’Iran. 

Lévy insista : « l’Amérique, en trahissant les Kurdes, s’est auto-infligée un véritable désastre moral et stratégique ; de ce fait, nous sommes entrés dans un monde nouveau où le mot Amérique est devenu égal à zéro. »

Mais le moment le plus surprenant, et peut-être le plus éclairant, de cette conversation fut le moment où l’on en vint aux prédictions de Tom Kaplan…

Kaplan, rappela Lévy, avait prédit l’invasion du Koweit par Saddam Hussein avant 1990. 

Puis, que l’accord avec l’Iran aurait pour résultat le retrait général de l’Amérique de la région.

Mais le plus étonnant est qu’il avait annoncé, en septembre 2019, qu’on allait assister à un développement inédit du conflit entre l’Arabie saoudite et l’Iran quelques jours avant les élections israéliennes ; et Kaplan, toujours selon le récit de Lévy, avait même annoncé : « à trois heures du matin » !

De fait, trois jours avant ces fameuses élections et, en effet, à trois heures du matin, les installations pétrolières d’Abqaïq et de Khurais furent frappées par des missiles…

Lévy, alors, pria son ami d’expliquer à la salle d’où lui était venue cette sidérante prémonition. 

Kaplan lui répondit qu’il n’avait d’autre mérite que d’être un peu historien et de se servir de l’Histoire pour éclairer le présent et, parfois, le futur. 

L’intégralité de cet échange, que je résume ici, est à retrouver dans la vidéo que La Règle du jeu poste aujourd’hui. 

Espérons que la nouvelle Administration américaine, à son tour, usera de l’histoire récente des Kurdes pour prévoir ce qu’elle doit impérativement faire, au Moyen-Orient, pour réparer ce qui a été détruit par l’Amérique de Trump ces dernières années.

Afin qu’enfin justice soit rendue aux Kurdes. 


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