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Cemil Bayik, co-président du conseil exécutif de l’Union des Communautés du Kurdistan (KCK).

Roj Info: “Do not participate in the genocide of the Kurds”


Entretien avec Cemil Bayik, Co-président du conseil exécutif du KCK (Union des Communautés du Kurdistan), à Firat News (ANF).

-Suite à une rencontre entre le président français Emmanuel Macron et des représentants de la Fédération du Nord de la Syrie, la France a déclaré qu’elle continuerait à être aux côtés des Kurdes. Pourquoi la France ? 

Les Russes disent : « c’est impossible sans les Kurdes », mais soutiennent le massacre des Kurdes. Les États-Unis font l’éloge des Kurdes parce qu’ils ont combattu l’EI, mais demeurent silencieux face aux attaques que les Kurdes subissent à Afrin. L’Iran déclare : « nous sommes contre l’occupation turque à Afrin ». Elle n’est pas d’accord avec la politique turque en Syrie, mais ne prend pas de réelles initiatives. De ce point de vue, il ne faut pas accorder beaucoup d’importance aux déclarations des États. Personne ne souhaite se mettre les Kurdes à dos.

Pourquoi ?

Parce que les Kurdes sont un peuple opprimé qui se bat pour une cause juste. Aujourd’hui, les Kurdes représentent l’état d’esprit le plus libre et le plus démocratique du monde. Personne ne veut avoir une telle force contre soi. D’un autre côté, les Kurdes sont un acteur important en Syrie. A cet égard, le régime syrien et l’Iran ne souhaitent pas de confrontation ouverte avec les Kurdes. Ainsi, la France doit également tenir compte des Kurdes.

La France se trouve-t-elle dans la même catégorie que les Etats que vous avez cités ?

Bien sûr que la position de la France est différente de celle des États-Unis, de la Russie, de la Turquie et de l’Iran parce que, depuis deux siècles, la France manifeste de l’intérêt pour la Syrie. Elle a beaucoup d’influence sur la Syrie. Lors de la Première Guerre Mondiale, la Syrie était sous mandat français. Depuis, il y a toujours eu un esprit politique français en Syrie. C’est pourquoi la relation de la France avec la Syrie est différente. En plus de cette relation particulière due à l’ancien mandat, les deux Etats entretiennent aussi des relations économiques. De ce fait, il faut suivre de près la politique française concernant la Syrie. Peut-être qu’on n’y prête pas beaucoup d’attention, mais il est important de voir et de comprendre ce lien historique avec la France. Si un nouvel ordre politique survient en Syrie, la France voudra jouer un rôle. C’est pour cette raison qu’elle garde des contacts constants avec les Arabes, les Kurdes et les Assyriens.

Il est cependant impossible que la France accepte la politique turque concernant la Syrie. Il y a eu un rapprochement au moment où il était question du départ d’Assad. Mais aujourd’hui, sa politique a changé. D’un autre côté, parce qu’elle connait très bien la Syrie, elle veut devancer les États-Unis et les autres États européens. Comme vous le savez, la France a beaucoup d’influence sur l’Union Européenne. De par sa relation historique avec la Syrie, c’est la France qui est la mieux placée pour orienter la politique syrienne de l’Union européenne. D’ailleurs, il se peut que l’Union européenne ait attribué ce rôle à la France.

La Turquie cherche à créer un nouvel Ottomanisme. Mais la Syrie et les Arabes gardent un mauvais souvenir des Ottomans, d’où la méfiance du monde arabe vis-à-vis de la Turquie. Cette méfiance est d’autant plus grande que la Turquie cherche à dominer et contrôler la région en profondeur.

Contrairement à la Turquie, les autres forces qui souhaitent s’imposer directement dans le pays, essaient d’être présentes en Syrie à travers des relations politiques, militaires, économiques. La France vient en tête de ces forces. C’est donc compréhensible que les Français entretiennent des relations avec les Kurdes.

On dit que la France était contre l’occupation d’Afrin et qu’elle avait donné des assurances avant même que l’invasion ne commence…

C’est aussi ce que nous avons entendu dire, mais Afrin a été occupée. La France a manifesté une certaine réaction mais n’a pas agi. Elle a même amené le sujet devant les Nations Unis, mais sans résultat. A cet égard, son approche politique n’a pas été très cohérente. Nous devons encore attendre pour savoir quelle sera la position de la France. Son approche sera-t-elle vraiment cohérente ? Va-t-elle établir avec les Kurdes une relation sur des bases démocratiques ? Adoptera-t-elle une position favorisant la participation des Kurdes à la démocratisation de la Syrie ? Ou son engagement d’être aux côtés des Kurdes restera-t-il lettre morte ? Nous le verrons avec le temps.

Faut-il ne pas accorder trop d’importance à cette rencontre et aux déclarations qui ont suivi ?

On ne peut pas considérer cette rencontre comme inutile et vide de sens. La France est en position d’influencer la politique générale de la Syrie. Notamment parce qu’elle est désormais une force intérieure à la Syrie, et non plus uniquement une force étrangère. C’est un État qui dispose d’un lobby et de soutiens importants sur les plans militaire et politique, à l’intérieur de la Syrie. Il faut donc prendre au sérieux l’engagement de la France à défendre les Kurdes. Mais l’expérience nous montre que, quand il s’agit des Kurdes, il faut accorder plus d’attention à la pratique qu’aux paroles.

Quelle est la situation du régime syrien, quelles sont ses relations avec les Kurdes ?

Le régime existe toujours. Il y a eu un temps où tout le monde voulait sa chute, mais aujourd’hui, ce n’est plus une priorité pour personne. Le régime n’a pas adopté une approche visant à résoudre la question kurde. Les Kurdes sont pour l’unité de la Syrie et absolument opposés à sa division. Quoi qu’on en dise, la Fédération Démocratique du Nord de la Syrie travaille à renforcer l’unité de la Syrie. Elle porte un projet visant la démocratisation de la Syrie et le vivre-ensemble dans une Syrie démocratique. À cet égard, les Kurdes sont pour l’unité de la Syrie. En Syrie, nous n’avons jamais encouragé et n’encouragerons jamais la division et le séparatisme.

L’approche actuelle du régime est erronée. Les autorités syriennes ne développent pas des relations saines avec les Kurdes, mais, en même temps, elles ne veulent pas se les mettre à dos. Il est nécessaire de développer une politique juste concernant les Kurdes.

La situation de la Syrie est également critique. Actuellement, Jerablus, al-Bab, Afrîn et Idlib sont occupés. Des gangs criminels se retirent des zones comme l’Est de la Ghouta pour se renforcer dangereusement dans les zones du pays occupées par l’armée turque. Cela traduit une division. La Syrie est actuellement divisée par la Turquie. Les Kurdes n’ont nullement l’intention de diviser, contrairement à la Turquie qui est en train d’instaurer une zone entièrement sous son contrôle et sa domination.

Cette situation ne dérange-t-elle pas le régime ?

Bien sûr que cette situation dérange la Syrie. Peut-être que dans une phase future, le régime et les Kurdes pourront agir ensemble contre l’occupation turque. Ils pourront développer une politique commune pour mettre fin à l’occupation d’Afrîn et chasser les forces turques et les gangs criminels d’Idlib, al-Bab et Jerablus. De toute façon, ils n’ont pas d’autre alternative. Ils doivent lutter ensemble contre l’occupation turque. En fait, tous les peuples de la région de Shahba -Turkmènes, les Tchétchènes, Arméniens, Assyriens, Alevis, Sunnites- doivent combattre ensemble contre ces gangs et contre la Turquie. Je pense que la Syrie évoluera vers cette configuration.

Que se passera-t-il s’il n’en est pas ainsi ?

La Syrie se divisera. Elle ne pourra tenir debout. Telle qu’on la connaît, la Turquie détruira le régime, de même que les forces politiques qui s’y trouvent. On ne peut imaginer les conséquences qui résulteraient de la création d’une telle zone par la Turquie. La Syrie doit se réveiller ! La Russie croit qu’elle pourra tranquillement faire sortir la Turquie de cette zone. Aujourd’hui, la Turquie coopère avec la Russie ; demain elle mènera une autre politique avec un autre État.

La situation du régime est donc critique en raison de l’occupation turque. Cette occupation va lui coûter très cher.

Êtes-vous en faveur d’une réconciliation entre le régime et les kurdes ?

Nous sommes, en effet, en faveur de cette réconciliation. Les Kurdes développent une approche politique qui va dans ce sens, mais ce ne sera pas possible si le régime syrien maintient ses anciennes positions vis-à-vis des Kurdes. Il faut une Syrie qui reconnaisse l’existence des Kurdes, leur liberté et leur droit à l’auto-administration. Nous souhaitons que la question kurde soit résolue à l’intérieur de la Syrie. Nous n’avons jamais changé de conception concernant cette question. L’approche de notre leader était la même. Les relations que les Kurdes entretiennent avec des forces telles que les États-Unis ne visent absolument pas à diviser la Syrie.

Si la Syrie adopte une approche correcte envers les Kurdes et qu’elle agit avec les kurdes, elle pourra également résoudra ses problèmes dans les autres domaines. Mais cette évidence échappe au régime syrien qui voit du séparatisme dans l’acquisition de droits et libertés par les Kurdes. La Syrie doit sortir de ce complexe et de cette vision étroite, et agir objectivement. La réconciliation ne sera pas possible avec la méfiance, les inquiétudes, les incitations et tous les réflexes négatifs engendrés par la perception nationaliste.

Il y a eu une rencontre entre la Russie, l’Iran et la Turquie. Quels en ont été les résultats ?

La Turquie a réalisé cette rencontre dans l’optique d’accroitre l’hostilité envers les Kurdes. Elle n’a pas d’autre objectif. La Turquie considère les Kurdes comme des terroristes et veut réaliser une rencontre fondée sur l’hostilité envers les Kurdes. Sur certains points, la Russie agit conjointement avec la Turquie concernant la question kurde, elle soutient cette animosité de la Turquie envers les Kurdes. L’Iran soutient également jusqu’à un certain niveau la politique kurde de la Turquie, mais pas totalement.

Pourquoi cette réserve de l’Iran ?

Parce que la Turquie cherche à se renforcer au Moyen-Orient en s’appuyant sur l’hostilité envers les Kurdes. Cette situation dérangerait la Russie et l’Iran. La Turquie tente d’utiliser l’Iran et la Russie à partir de l’hostilité envers les Kurdes, mais n’arrive pas à les mettre d’accord sur ce point. L’Iran n’accepte pas la politique de la Turquie concernant la Syrie et le Moyen-Orient. C’est pourquoi il ne la soutiendra pas entièrement.

Dans cette rencontre, les deux parties les plus en phase ont été la Turquie et la Russie.  A côté de la rencontre tripartite, il y a eu d’autres rencontres. Il y a aussi des enjeux économiques. La Russie veut sa part du gâteau sur le marché économique turc. Et la Turquie utiliser la Russie en lui servant cette part. Elle veut l’utiliser à Manbij.

Comment va-t-elle l’utiliser à Manbij ?

La Russie a le projet d’intervenir à Manbij en coopération avec les Turcs, contre les Kurdes et les Américains. C’est un projet en discussion. Nous recevons des informations concernant cette relation, mais ce n’est pas encore clair. Durant cette rencontre, Les parties ont surtout parlé de l’intégrité territoriale de la Syrie. La notion d’intégrité territoriale est utilisée par chaque puissance selon ses intérêts. Elle est aussi utilisée par la Turquie pour justifier son agression contre les Kurdes.

Le sujet de Manbij est toujours d’actualité. Que se passe-t-il à Manbij ? 

La question de Manbij est maintenue à l’ordre du jour de l’Etat turc dominé par la coalition AKP-MHP. C’est en faisant pression sur les Etats-Unis à ce sujet que la Turquie a obtenu son silence concernant l’invasion d’Afrin. Il y a des Kurdes à Manbij, mais la population est majoritairement arabe. La ville dispose d’une administration, d’assemblées civile et militaire qui sont, autant que nous le sachions, composées à majorité d’Arabes. Elle est gouvernée selon le concept de nation démocratique. Les Arabes sont en amitié avec les Kurdes. Le fait que les habitants de Manbij adhèrent au projet démocratique est un sujet d’inquiétude pour la Turquie qui ne veut pas d’une démocratisation de cette région. C’est pour cette raison qu’elle attaque Manbij. La Turquie veut créer un conflit entre les Arabes et les Kurdes en Syrie. A Manbij, il n’y a pas eu de conflit entre Kurdes et Arabes. Ceux-ci vivent en fraternité, avec une administration démocratique conjointe. La Turquie est contre cela. Elle veut briser ce projet démocratique et mettre Manbij sous la coupe de bandes criminelles majoritairement affiliées Al-Nosra ou issues de Daesh. Si elle obtient Manbij, elle étendra son contrôle plus loin. Idlib, Afrîn, Jarablus, Al-Bab sont déjà sous son contrôle. Maintenant, elle dit vouloir prendre Tall Rifaat. Elle cherche de cette manière à étendre sa domination et son influence au Moyen-Orient. Elle vise à maintenir sur les Arabes du Moyen-Orient l’influence du nouveau concept d’ottomanisme.

Le peuple de Manbij n’acceptera pas l’invasion turque, il résistera. Les régimes syrien et iranien également n’accepteront pas. La Russie collabore davantage avec la Turquie qu’avec le régime syrien. La Russie nourrit la Turquie et la renforce.

En tant qu’organisation, à quoi vous attendez-vous durant les prochains mois ? Quelles vagues d’attaques pouvez-vous prévoir et quelle ligne de défense en réaction ? 

La lutte pour la liberté du peuple kurde a évolué au cours des 45 dernières années en franchissant une multitude d’obstacles. Lutter pour la liberté du peuple kurde, c’est gagner des combats dans des conditions très difficiles. Il est clair qu’au cours de la troisième guerre mondiale, la lutte des Kurdes pour la liberté et la démocratie se passe et se passera de façon plus difficile.  Nous sommes dans une période de bouleversement des anciens équilibres et de transition vers de nouveaux. Dans une telle période, le combat sera dur, violent, les attaques seront lourdes et massives. Nous devons voir cela comme la réalité de la lutte pour la liberté du peuple kurde. Rechercher des gains faciles au Kurdistan, rechercher des solutions faciles, s’attendre à une lutte facile, c’est se mentir. Les Kurdes ne peuvent pas se leurrer.

Le colonialisme génocidaire de l’État turc intensifie ses attaques pour que les Kurdes ne prennent pas part aux nouveaux équilibres régionaux et pour qu’ils restent esclaves des Etats-nations, comme au XXème siècle. Pour que les Kurdes ne respirent pas librement, la Turquie attaque toutes les forces démocratiques. Les attaques sont très intensives à ce niveau. Le chemin sur lequel nous avançons est jalonné d’obstacles, de moments douloureux et d’attaques intensives, mais nous allons, encore une fois de plus, surmonter tout cela. Il n’y a aucune faille dans la détermination de notre lutte.

Il ne sert à rien de se plaindre en se demandant pourquoi ils attaquent autant. C’est la réalité de l’ennemi, c’est la réalité du génocide. Notre approche, notre mission, ce n’est pas de nous plaindre, mais de combattre ces attaques. Comme nous le faisons depuis des décennies, nous continuerons à le faire. Que personne ne doute de cela. Les attaques s’intensifient au fur et à mesure que le peuple kurde s’approche de la liberté. C’est dans ce sens que nous allons augmenter la lutte et la résistance. Tout le monde doit savoir cela.

Les Kurdes et les forces démocratiques sortiront gagnants du combat contre le fascisme de l’AKP-MHP. C’est en résistant que nous gagnerons. Pas en attendant. Si nous attendons, si nous ne résistons pas, nous serons écrasés, nous subirons un génocide, nous serons détruits. Le PKK est connu dans l’histoire pour avoir affronté des difficultés. Aujourd’hui aussi les conditions sont difficiles. Notre peuple est agressé, mais nous briserons cela ensemble avec notre peuple et les forces démocratiques. Le mouvement de libération peut mener la lutte jusqu’à un certain point, mais il n’est pas juste de laisser les combattants seuls dans cette lutte. La lutte doit être globale.  Nous traversons incontestablement l’une phase les plus critiques de l’histoire du mouvement de Libération

Pourquoi la qualifiez-vous de très critique ?

Parce que le fascisme veut obtenir des résultats très rapides. Quant à nous, nous allons briser la volonté de l’AKP-MHP d’éliminer les Kurdes au moyen du génocide. Nous allons leur faire payer cher leur hostilité envers le peuple kurde. Ceux qui veulent éliminer le peuple kurde courent à leur perte.

Il n’est plus possible de dialoguer avec ces forces, ni de faire des compromis. Nous allons continuer à les combattre. Nous nous donnons tout entier à la lutte. Nous n’avons pas d’autre programme que la lutte. Durant le printemps et l’été, nous allons élever la lutte de la guérilla, et la lutte du peuple augmentera également. Nous allons accroître la lutte dans tout le Moyen-Orient.

Erdogan ne cesse d’élever le ton, tente de paraître sûr de lui. Comment interpréter cela ?

Il ne faut pas prêter d’attention aux élévations de ton d’Erdogan, cela relève en grande partie d’une guerre psychologique. S’il crie autant, C’est parce qu’il veut se montrer fort, c’est pour briser la volonté du peuple kurde. Tous les moyens sont bons pour sa guerre psychologique. Mais en réalité, Erdogan est très faible et fragilisé. C’est surtout pour cette raison qu’il est si agressif, qu’il réprime la moindre opposition. Il vit avec la peur, même une déclaration, une prise de position de quelques jeunes lui fait peur. C’est pour couvrir sa peur qu’il manifeste autant d’agressivité. Ainsi, si nous luttons, nous briserons son pouvoir. Il va d’ailleurs perdre gros, parce qu’il a misé tous les moyens de la Turquie sur la table de jeux.

Certains prétendent que cette vague d’attaques cible uniquement le PKK…

Cette attaque ne tend pas seulement à l’anéantissement du PKK, elle vise à détruire les Kurdes, à asservir le peuple kurde, c’est une tentative de génocide. A cet égard, aucune force politique ne doit en être dupe. C’est une attaque qui ne vise pas uniquement la liquidation du PKK. Elle a un objectif plus large : détruire la volonté de toutes les forces politiques kurdes. Tout le monde doit prendre conscience de cette réalité. Ceux qui pensent autrement se bernent eux-mêmes.

Vous venez d’évoquer la tâche qui incombe au peuple, comment le peuple du Kurdistan doit-il comprendre la lutte ?

En plus des martyrs dans la guérilla, notre peuple a donné jusqu’à présent des dizaines de milliers de martyrs : des femmes, des jeunes, des enfants. Nul doute que nous allons encore payer des tributs. Comment pourrons-nous continuer reprendre la lutte de nos dizaines de milliers de martyrs sans payer un nouveau tribut? Si ce peuple a donné jusqu’à présent des dizaines de milliers de martyrs pour la lutte de libération, il continuera à le faire. Dans les quatre parties du Kurdistan, notre peuple devrait s’engager dans la lutte en employant tous les moyens à sa disposition. La conception de la lutte durant les périodes de cessez-le-feu n’a pas permis aux Kurdes d’atteindre la liberté. C’était une phase temporaire. Aujourd’hui, seule la lutte dans des conditions difficiles peut permettre aux Kurdes d’acquérir la liberté, la démocratie, et de garantir leur existence. C’est la loi de la révolution kurde et de la lutte pour la vie libre. Nous appelons le peuple du Kurdistan, dans toutes ses composantes, à en prendre conscience et à poursuivre cette lutte, quelles qu’en soient les conséquences. La jeunesse kurde a un rôle primordial à jouer dans cette période critique.

Cette responsabilité incombe-t-elle uniquement au peuple kurde ou également aux forces démocratiques ?

Les responsabilités ne concernent pas uniquement le peuple kurde, mais aussi tous les acteurs démocratiques. L’ennemi des Kurdes est l’ennemi de la démocratie. Que tous ceux qui se disent démocrates travaillent avec les Kurdes. Nul ne peut prétendre améliorer les conditions de la démocratie s’il ne collabore pas avec les Kurdes. Toutes les populations qui subissent des atrocités de la part du gouvernement turc doivent être solidaires l’une de l’autre. Nous disons qu’il faut lutter ensemble contre le fascisme, en Turquie et au Moyen-Orient.

Que souhaitez-vous dire à l’opinion publique et aux États qui maintiennent leurs relations avec la Turquie ?

Nous souhaitons donner ce message au monde entier : ne participez pas au génocide kurde ! La Turquie n’est pas un État quelconque : c’est un État génocidaire. Durant la Première Guerre Mondiale, elle a massacré les Arméniens ; dans la Deuxième Guerre Mondiale, elle ne s’est pas engagée ; et dans la Troisième, elle entreprend de faire disparaitre les Kurdes.

Nous nous adressons d’ici à la Russie : la Russie a une responsabilité énorme. Elle porte la responsabilité du génocide kurde. Ce qui se passe à Afrin est un génocide kurde. La composition démographique va être modifiée en profondeur. 90% des habitants d’Afrin ont quitté la région. La Russie ouvre les portes de la Syrie à la Turquie. Il faudra juger l’approche de la Russie qui permet à la Turquie d’entreprendre un génocide en contrepartie de gains politiques et économiques. Le peuple russe a des valeurs morales. Nous prévenons la Russie et Poutine. Ne participez pas à ce génocide. Erdogan est un fasciste tout comme l’était Hitler. Ils doivent remettre leurs politiques en question.

L’Europe, les États-Unis ainsi que toutes les nations et forces démocratiques doivent voir cette réalité. L’objectif de l’État turc est de détruire les Kurdes. Cette réalité ne doit pas être ignorée. S’ils ont un tant soit peu de valeurs morales et humaines, ils ne cèderont pas aux chantages et aux pressions de la Turquie. Actuellement, l’Allemagne cède à la Turquie concernant le chantage des réfugiés. Personne ne doit verser de rançon à la Turquie. Personne ne doit soutenir le génocide de la Turquie.

Pour finir, nous saluons les forces démocratiques et les peuples du monde pour leur solidarité avec les Kurdes.

 


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